Lettre sans destination.
Cher Inconnu,
C'est parfois en n'adressant ses maux à personne que l'on trouve la paix, ou du moins qu'on a l'impression de l'atteindre, car tout esprit est tourmenté. Poser des mots face à une objectivité, sans les choisir avec soin car le destinataire ne nous connaît pas... Ou alors, ce dernier est-il nous même ? Mais finalement peut-on vraiment savoir qui on est ?
En tout cas, cette découverte est difficile, longue et terriblement douloureuse. Le doute fait mal. Et moi, je ne trouve un peu de répit qu'avec mon stylo bic. Les mots ne sortent jamais de ma bouche si justes que par la mine, ils restent bloqués au bord de ma langue honteux et brûlants. Alors c'est le coeur gros que je fais toujours mine d'aller bien même quand la machine tourne de travers. C'est vrai, j'ai honte de me sentir mal quand je vois toute cette misère autour, et mon impuissance face à elle ne fait qu'accentuer toujours plus mon malaise.
J'ai trop vite perdu le contrôle et maintenant tout dérape. J'ai plus que jamais besoin de mes parents, qu'on m'aide à porter ma vie et les nouvelles responsabilités qui me suivent, alors que je grandis et deviens adulte. Quel paradoxe !... A l'image même de mon être et de mon existence. Oui et Non. Peut-être et J'en suis sûre. Noir et Blanc. Pas de "ou", c'est les deux. Toujours et Jamais. Trop complexe. Tellement, que lorsqu'on s'y penche, on crée encore plus de noeuds dans son esprit.
Je crois que les gens qui pensent trop sont malheureux. Il suffit de regarder les grands philosophes. A trop se poser les questions que personne d'autre ne se pose, ils se sont pour la plupart donnés la mort. Comme s'ils s'étaient trop entourés de mots et de vide. Se brûle t-on à la chaleur humaine ?
Il y a quelques années, j'avais fait un cauchemars. J'étais au centre d'une plateforme et autour de moi gravitaient les gens que j'aime, rattachés à moi par des élastiques. Mais au fil du rêve, ces derniers se brisaient un à un. Ca m'avait beaucoup affecté au réveil. Désormais, je crois que de nombreux élastiques se sont bel et bien détachés, et d'autres tendent de plus en plus à le faire... Alors, comme je n'ai plus la force d'essayer de raccrocher les bouts, je m'accroche à ceux qui restent comme on veillerait sur un coffre précieux. Mais ma vie se peuple de vide, et c'est une sensation désagréablement étrange.
Il faut avouer aussi, que je ne fais pas beaucoup d'efforts pour aller vers les autres. Je n'ai pas confiance. Ni en moi. Ni en eux. Je fuis les contraintes affectives par angoisse. Cette boule étouffante que je ne parviens pas encore à ré-oxygéner. Faut admettre que je n'arrive pas à grand chose ces temps-ci de toute façon.
Tu sais ce que je voudrais vraiment ? C'est rentrer chez moi, me reposer dans ma petite famille, reprendre confiance et retrouver un peu d'estime de moi-même... Reprendre doucement du poids pour ne plus être à la limite entre le "grave" et le "pas encore trop tard"... Retrouver mes envies et mon goût de la vie (qui était immense...)... Et plus incongru, je voudrais un bébé, mais sans papa, ou alors un "Papa Charmant"... Un bien pour de vrai. Mais ça faudra encore attendre un peu je crois. Pour l'instant je veux m'arrêter et retrouver ma maison.
" Si dans la vie faut prendre des risques, faut savoir aussi s'en aller..."
Maud